Notion de périmètre, restrictions d’accès à certains lieux, isolement et sentiments qui vont avec, le handicap peut parfois se transformer en confinement. Dans cette chronique, je vais vous expliquer un aspect du handicap à travers le prisme du confinement, qu’une grande partie de la population a pu expérimenter en 2020 et 2021.
Point commun entre handicap et confinement : la notion de périmètre
Confiner : Forcer à rester dans un espace limité. (Le Robert)
Vous vous souvenez, lors de la pandémie, nous avions droit à un rayon de 10 km. Avec mon fauteuil trottinette électrique, j’ai un rayon d’environ … 5 km. C’est à dire que je peux me rendre dans le centre ville de ma petite ville de bord de mer, voire jusqu’à la plage, mais pour aller dans la petite métropole du coin, c’est “chaud patate”.
Avant, je n’utilisais le fauteuil que pour les longues sorties, quand je devais rester plusieurs heures debout (par exemple, un concert). Je m’octroyais des petites séances shopping (parce qu’on a jamais assez de stylos) avec ma canne, en faisant des pauses dans des cafés ou crêperies. Le lendemain j’étais HS, mais ces petites sorties avec moi-même me faisaient un bien fou.
Aujourd’hui, je ne tiens presque plus debout, je n’arrive plus à marcher de chez moi à mon arrêt de bus depuis le printemps 2024, encore moins marcher pour me balader.
Mon instabilité articulaire au niveau des épaules et poignets ne me permet pas d’utiliser le fauteuil manuel pour aller jusqu’à l’arrêt de bus ou plus loin. J’ai essayé une fois lors de ma rééducation, je me suis évidemment déboité l’épaule. Pour se propulser avec un fauteuil manuel, il faut une force herculéenne ! Pour pouvoir se payer un fauteuil en carbone réellement maniable, il faudrait que je me trouve un Sugar Daddy très fortuné.
Tant que je n’ai pas mon fauteuil électrique, je ne peux ni monter voir ma famille en région parisienne, ni partir en voyage. Ne pas en avoir la possibilité donne le sentiment d’être coincée. Je me réconforte en m’imaginant princesse qui chante avec les oiseaux (ce n’est pas une métaphore), sauf que je n’attends pas la venue d’un prince mais que marraine la bonne fée MDPH m’accorde mon carrosse 🦼.
Et encore, le boss final du confinement, ça reste l’hospitalisation. Le périmètre passe à 0, la nourriture est immonde, on attend nos proches autant que le nouveau messie. À côté d’un confinement en rhumatologie, être confiné chez soi c’est le grand luxe.
Les mêmes contraintes que lors du confinement : bye bye les bars et lieux sociaux
Isolement, Isolé : Séparé des autres humains (Robert)
Pendant le confinement : kiné, rendez-vous médicaux, pharmacie, balades du chien
Dans l’attente du fauteuil : kiné, rendez-vous médicaux, pharmacie, balades du chien, magasin de bricolage parce que c’est le seul où les allées sont assez grandes pour la trottinette.

Mon fauteuil trottinette est énorme et ne rentre pas dans tous les magasins. C’est à peine si je suis acceptée dans le bus, j’y ai déjà été refusée tant mon char d’assaut est peu conforme. Je ne peux pas me placer correctement, la manœuvre pour descendre du bus demande un brevet de pilotage.
Il y a des lieux, même proches de chez moi où je pourrais aller avec le fauteuil trottinette ou via le service de transports pour PMR, mais je n’ose pas, par peur d’avoir un torticolis. Si je passe trop de temps sans reposer mes cervicales, c’est ce qui arrive… C’est pour ça que j’ai choisi un fauteuil avec appuie-tête. L’essai m’a confirmé que oui, je pouvais sortir sans avoir la nuque de travers le lendemain.
Le manque de vie sociale est une vraie problématique chez beaucoup de personnes en situation de handicap. Rencontrer d’autres personnes est plus difficile pour nous que pour les valides, qui peuvent aller partout quand ils veulent.
Nous devons affronter un autre phénomène : les personnes qui prennent la fuite comme des pokémons. Perdre une personne avec qui on pensait être réellement ami est très difficile, qu’on soit valide ou pas, et je n’ai pas besoin de faire un dessin pour vous expliquer à quel point ça peut être dur et difficile de réaccorder sa confiance envers de nouvelles personnes.. Chaque perte de vie sociale renforce la sensation de confinement. La solitude, ce n’est pas seulement être seul, mais aussi d’être isolé des autres. Mais, comme le dit George Sand dans Indiana en 1832, « La solitude est bonne, et les hommes ne valent pas un regret ».
Sans aller jusqu’au stade du fauteuil roulant qui ne va pas partout, les douleurs et la fatigue chronique suffisent à elles-seules pour impacter la vie sociale. Il suffit d’être trop HS pour sortir, trop fatigué et bye bye la vie sociale.
Même quand on aime la solitude, trop de trop tue le trop
Seul : Sans compagnie, séparé des autres. Peu de relations avec les autres personnes.
Sans aide. (Toujours Robert)
Imaginez, vous aimez tellement un plat que vous ne mangez que ça tous les jours. Ne seriez-vous pas lassé au bout d’un moment ? C’est ce qui se passe avec la solitude.
La solitude devient difficile à vivre quand ce n’est plus un choix mais une contrainte.
Peut-on parler de charge mentale pour soi-même lorsque l’on vit seul ? Etre handicapée et vivre seule sans aidant, c’est un challenge. Je dois constamment tout gérer et tout affronter seule (en ayant très mal). C’est difficile, et en même temps je suis fière de m’en sortir aussi bien.
À la base, j’adore être seule. Manger ce qui me fait envie, regarder ce que je veux sans aucun jugement. J’ai une sorte de mantra, “Je ne suis pas seule, je suis libre”. Même moi qui affectionne la solitude, elle commence à un peu à me peser de temps à autre.
C’est plus que normal, qu’au bout de 8 mois de procédure du fauteuil, bientôt 1 an à ne plus pouvoir sortir, 4 ans loin de mes proches, j’expérimente le sentiment de solitude, d’une autre manière qu’à l’adolescence.
La solitude passé 30 ans, c’est ce que j’appelle le syndrome de déprime dominicale. C’est quand on a ni soirées le samedi soir, ni soirées en amoureux. C’est quand personne ne nous apporte le café au lit le matin et ne partage avec nous les croissants. Des fois, je suis un peu tristoune quand je met au point une nouvelle recette et que je n’ai personne à qui la faire déguster. Bon, ça, je crois que c’est plus un discours de personne célibataire que confinée 😅 (Carrie Bradshaw sors de ce corps, en plus les millenials n’ont pas la ref).
CONCLUSION : JATTEEEEEEEEEENDS
Tout comme pour le confinement, je n’ai d’autre choix que d’attendre, sans avoir la date exacte de ma délivrance. Sénèque a dit, “Le plus grand obstacle à la vie est l’attente, celui qui espère demain néglige aujourd’hui”. Pour ne pas négliger aujourd’hui, je vous prépare un article sur comment apprécier la solitude et ne pas en souffrir.
Le petit mot de l'autrice
Chers lecteurs, je reviens enfin après une longue pause. Je me suis concentrée principalement sur mon livre, sur le prochain et sur ma santé, puisque j’ai vécu une autre errance médicale. Mes entorses et luxations répétitives ont déclenché au niveau de ma jambe droite une algoneurodystrophie, maladie que j’apprends encore à domestiquer. Rassurez-vous, j’ai plusieurs articles sur le feu, presque terminés et la volonté de publier de manière régulière des articles sur ce site qui me tient à cœur.
Articles à venir en préparation :
Ma rééducation en centre spécialisé
Procédure pour l’achat d’un fauteuil roulant
Comment apprécier la solitude et ne pas souffrir de l’isolement
Le surdiagnostic de la fibromyalgie
Ma 2ème errance médicale
C’est en suivant mes propres conseils de mon livre sur l’errance médicale, que les médecins ont enfin fini par trouver ce qui n’allait pas. Je vous encourage donc à vous aider de cet outil que j’ai créé, si vous ou un l’un de vos proches êtes dans cette situation.
Mon livre : En finir avec les errances médicales, Lisa Naudé, éditions Idéo 2024
Disponible à la Fnac, Cultura, Leclerc, Amazon, leslibraires.fr, Place des libraires, Decitre, La Procure, Rakuten, Eyrolles librairie, Hall du livre, et disponible en commande dans n’importe quelle librairie 💖
Handi_mermaid (blagues, humour sur la maladie et le handicap)
