LIEN DE LA PETITION
En février 2020, l’Assemblée nationale a voté une proposition de loi pour désolidariser les revenus du conjoint dans la prise en compte des revenus de l’AAH (Allocation Adulte Handicapé). Le combat est loin d’être gagné puisque la proposition de loi est bloquée au stade d’examen et que la secrétaire d’État chargée du handicap y est opposée.
Pourtant, la prise en compte des revenus du conjoint est une injustice qui nuit aux personnes handicapées. Sa désolidarisation est plus que nécessaire, j’ai décidé d’expliquer pourquoi et témoigner.
Perdre son allocation c’est perdre en autonomie
Que l’on soit marié ou non, à partir du moment où l’on vit en concubinage, les revenus du conjoint sont pris en compte dans le calcul de l’AAH. Si partenaire touche plus de 1 633 €, l’allocation est supprimée.
Cela signifie que financièrement, la personne handicapée dépend totalement de son conjoint. Il faudra constamment demander de l’argent à son conjoint, ne serait-ce pour faire les courses. C’est comparable à la vie d’une femme des années 50, nous sommes pourtant en 2021, les personnes handicapées aussi méritent d’être autonomes.
Nous perdons déjà en autonomie à cause de notre handicap, ce n’est pas normal de perdre encore en autonomie à cause de la société. Nous méritons notre indépendance tout autant que les valides.
Je suis passée par là. La MDPH a demandé les fiches de paye de ex-compagnon, contrôleur de gestion. Alors évidemment, éligible ou pas, je n’ai eu droit à rien.
Chaque mois, il devait me faire un virement pour que je puisse m’acheter à manger. C’était lourd pour lui comme pour moi et ça a énormément nui à notre couple.
La dépendance financière est une charge mentale pour l’aidant familial
C’est une responsabilité énorme pour le conjoint qui doit assumer seul la situation financière du foyer. Cela augmente la charge mentale déjà lourde pour l’aidant familial. Pourquoi une personne valide devrait renoncer à une partie de son salaire parce qu’elle est avec une personne handicapée ?
Les valides ont droit de vivre avec deux sources de revenus, mais nous, les handis, puisqu’on est malades, on doit survivre à deux avec un seul salaire ?
Cette dépendance financière a d’autres conséquences graves. C’est une source de contrôle pour les personnes victimes d’abus de leur partenaire. D’ailleurs, le contrôle des dépenses est l’une des formes des violences conjugales, c’est pourtant une situation que l’on impose aux personnes handicapées, est-ce normal ?
Je n’ai pas été victime de ce type de violence. En revanche, je culpabilisais de m’acheter quelque chose pour moi avec le salaire de mon ex. Je ne me sentais pas autonome, j’avais l’impression d’être un fardeau, une taxe sur son salaire. Et je ne veux plus jamais revivre ça !
Les lourdes conséquences : une situation précaire en cas de rupture
En cas de rupture, la personne handicapée se retrouve sans rien du jour au lendemain. Et l’AAH, ça ne s’obtient pas du jour au lendemain. Ça prend au minimum 6 mois, parfois plus d’un an selon les départements. Même quand la situation est urgente, que la personne n’a plus de domicile, ça prend toujours autant de temps.
Me voici 1 an après ma rupture, et je n’ai toujours pas de dossier à jour, ni d’AAH. Ma demande est en cours, j’ai bien entendu coché la case « urgent », expliqué que j’étais en situation précaire, j’attends toujours.
Ça a été très difficile pour mon ex de me quitter, il savait que j’allais me retrouver sans rien du jour au lendemain. J’ai eu beaucoup de chance, il m’a soutenu financièrement après notre rupture, le temps que je retombe sur mes pattes (et je l’en remercie!). Mais je ne peux m’empêcher de penser à celles et ceux qui n’ont pas eu cette chance… Comment vont-ils s’en sortir ?
Ce non sens de vouloir privilégier un « retour à l’emploi » pour ceux qui ne peuvent pas travailler
Sophie Cluzel, notre secrétaire d’État chargée des personnes handicapées est opposé à cette loi. Elle souhaite « privilégier l’insertion et le maintien dans l’emploi des personnes handicapées ». Ce type de propos est une blague monumentale.
Si certaines personnes n’arrivent pas à travailler, ce n’est pas par manque de volonté ou d’adaptabilité, mais parce que c’est parfois impossible. Certaines maladies ou handicaps sont incompatibles avec une vie professionnelle. Quand se laver est un challenge, travailler relève de l’impossible. Vous pensez que c’est possible de travailler correctement lorsque l’on a le cerveau lobotomisé par les médicaments ?
Certaines personnes handicapées peuvent travailler, mais pas suffisamment pour avoir un salaire décent. L’AAH sert de complément aux petits salaires. C’est mon cas. J’ai fait des études, une formation, je suis bac+5. J’ai beau donner mon maximum, ça ne suffit pas pour avoir un salaire « normal ».
J’ai eu une évaluation de capacités fonctionnelles par l’Agefiph, ça s’est conclu par « peu importe le métier que vous choisirez, vous n’aurez jamais un salaire normal à cause de votre handicap, vous avez besoin de l’AAH ».
En conclusion, prendre en compte les revenus du conjoint signifie :
- une perte d’autonomie pour la personne handicapée
- crée une dépendance financière
- alourdit la charge mentale de l’aidant familial
- crée un risque de précarité en cas de rupture.
Il est hors de question de perdre mes droits à cause de qui que ce soit. Plus question de quémander pour m’acheter à manger. Je ne veux pas imposer cela à mon ou ma future partenaire, même s’il est encore imaginaire.
Si vous aussi vous êtes indignés, merci de signer (+1 pour ton karma si tu le fais) !
Illustration : ©Ninis et sed
Mon livre : En finir avec les errances médicales, Lisa Naudé, éditions Idéo 2024
Disponible à la Fnac, Cultura, Leclerc, Amazon, leslibraires.fr, Place des libraires, Decitre, La Procure, Rakuten, Eyrolles librairie, Hall du livre, et disponible en commande dans n’importe quelle librairie 💖
Handi_mermaid (blagues, humour sur la maladie et le handicap)

I pay a visit every day some sites and sites to read content, except this weblog gives quality based articles. Forest Boisclair